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III

Et qu’importe, du reste, que La Maison de Penarvan soit un roman ou une histoire ; qu’elle soit quelque touchante anecdote racontée à son auteur au coin du feu ou dans un coin de voiture ; que ce soit un livre déjà connu, déjà écrit et qu’on a repris en sous-œuvre pour y ajouter ! Toute l’originalité humaine n’est peut-être qu’une manière supérieure de nous répéter les uns les autres. Il importait peu à Shakespeare que son Roméo et Juliette fût dans une maigre nouvelle du Bandello. « Les lettres de l’alphabet m’appartiennent », disait ce joyeux bandit de Casanova quand on lui demandait pourquoi il s’était donné un faux nom. Toutes les données dramatiques, tous les types humains (et le cercle en est vite parcouru ; ce n’est pas l’esprit de l’homme qui est infini, mais son cœur !), toutes les données et tous les types sont un alphabet dont nous pouvons renverser et combiner différemment les lettres ; mais il faut le pouvoir ! Ce n’est pas, assurément, la première fois qu’un romancier a peint l’orgueil nobiliaire, ce magnifique sentiment social, périssant invaincu sous sa couronne fermée, dans l’inflexible pureté de son blason, et qu’on a essayé de nous montrer, comme M. Sandeau dans sa Renée de Penarvan, les dernières palpitations, dans un grand caractère, de toute une race qui ne s’abaisse ni devant les hommes ni devant le temps.

Ce genre d’âme n’est pas une découverte, mais il fallait