Page:Barbey d’Aurevilly - Les Romanciers, 1865.djvu/114

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et du même sifflet ; et la Critique, en général, eut pour lui, comme pour ces messieurs, les bontés un peu compromettantes pour tout le monde, que les vieilles femmes qui ne furent pas bégueules ont parfois pour les lycéens.

Et le Public s’y prit aussi, et plus franchement que la Critique. Là où les réputations s’acceptent, comme là où elles s’arrangent, il fut universellement reconnu et convenu que M. About est un charmant esprit capable de tout, s’il voulait en prendre la peine, mais qui a jugé son temps et la vie, et qui ne se gêne pas, ma foi ! pour donner à ce temps autre chose que des globules homœopathiques de talent, puisqu’il ne lui faut plus que cela ! Le croira-t-on ? M. About, qui a dans l’esprit, et qui l’outre, la légèreté insupportable aux esprits vulgaires et aux vanités rengorgées et dignes, M. About est présentement la coqueluche des bourgeois. Ils lui trouvent étonnamment d’esprit, et c’est bien honorable. Il doit être flatté… cruellement.

Enfin, ce n’est pas tout. Sans qu’il y soit pour rien probablement, M. About est devenu le légendaire de par le Puff, cette seule légende du XIXe siècle. Ses amis ont eu la bonté d’apprendre au monde que le talent de l’auteur de Tolla faisait sortir de terre les testaments et les donations, et que, comme Burke et Chatham, il avait trouvé des duchesses de Marlborough qui, par fanatisme d’admiration, avaient versé sur sa tête la corne d’abondance de toute une fortune ! Était-ce pour le prouver ? On parlait d’un chalet divin. On en faisait un monument… public ! Les journaux, ces dignes camarades qui aiment à déjeuner, exposaient