Page:Barbey d’Aurevilly - Les Romanciers, 1865.djvu/115

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avec jubilation le menu des déjeuners qu’on y donnait à la fourchette. Voilà comme, en très-peu de temps, a jailli la renommée de M. About ! Si ce n’était pas de la gloire, cela en était bien près. Cela y touchait. Si ce n’était pas cette grande fille qui a aussi ses faiblesses, c’était son gamin de frère qui se donne souvent pour elle, c’était le bruit ! Eh bien ! encore une fois, en raison de ce bruit, il est curieux de voir ce que sont les livres d’un homme qui, par ses livres et en trois temps, arrive dans un siècle sans cœur, indifférent aux courageux qui luttent, à cette petite importance-là !


II

C’est que ses livres ne sont pas des livres. Ils sont tout ce qu’on voudra : des feuilletons, des causeries, de vieux jeux de cartes battus et rebattus avec plus ou moins d’adresse ; des entrelacements de ficelles plus ou moins redoublées et dénouées ; des pilules contre l’ennui, arrangées pour s’avaler d’une station à l’autre dans le mouvement d’un chemin de fer, mais ce ne sont pas des livres, des compositions ordonnées et réfléchies, des choses d’observation et d’art. Dans une société toujours en chemin de fer, même quand elle n’y est pas, et beaucoup trop pressée pour lire attentivement et avec suite, il faut écrire à son usage, de manière à ce qu’elle comprenne et même s’intéresse, si cela se peut, à ce qu’elle lit, en pensant au sort de ses colis et de ses affaires ; il faut enfin une littérature