Page:Barbey d’Aurevilly - Les Romanciers, 1865.djvu/269

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pas paraître trop atroce : il avait franchement tort, il était franchement passionné, mais c’était un homme blessé, c’était un homme !

L’auteur d’Elle et Lui n’est qu’une femme, et elle n’a rien de plus dantesque que Caroline Lamb (maintenant oubliée), quand elle publia son petit roman contre Lord Byron. Selon nous, le livre de Mme Sand ne méritait pas l’anxiété qui a, dit-on, rongé la vie de ce rêveur d’Alfred de Musset, et le livre, qui n’est pas un rêve, à ce qu’il paraît, de son frère. Quelle que soit l’intention, que Dieu seul peut juger (et qu’il jugera, madame), quelle que soit l’intention qui anime en secret Lui et Elle, c’est un scandale sans doute, que ce livre, un misérable scandale, qui n’est pas fait pour agiter deux jours une saine et honnête littérature ; mais, hors cela, c’est un coup manqué !

M. Paul de Musset n’a pas cru, lui, qu’il le fût… et il a opposé roman à roman, titre à titre ; et ce n’est pas tout, à la fin du sien, qui est très-net, très-aiguisé, très-ajusté à la poitrine et dans lequel il ne dit pas de son Olympe ce que Mme Sand dit de son Laurent : « Il avait le cœur admirablement bon », M. Paul de Musset raconte avec un accent qui n’est pas celui de l’invention romanesque, « qu’en faisant ce récit, il n’est que l’exécuteur testamentaire d’une volonté respectée », et l’accent est tel qu’on le croit.

Littérairement (s’il est permis de finir par un mot de littérature en présence de livres pareils), le roman de M. de Musset est écrit avec le goût un peu sec, mais ferme, d’un homme qui a beaucoup lu les romans du dix-septième siècle et qui s’est tapissé l’esprit de leurs formes. A part toute personnalité blessée et