Page:Barbey d’Aurevilly - Poussières.djvu/71

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Je te reconnaissais, voluptueux supplice !
Quand l’homme cherche, hélas ! dans ses maux oubliés,
De l’abrutissement le monstrueux délice…
Et n’est ― Circé ! ― jamais assez, à son caprice,
La Bête qui lèche tes pieds !

Pauvre amour, ― le dernier, ― que les heureux du monde,
Dans leur dégoût hautain, s’amusent à flétrir,
Mais que doit excuser toute âme un peu profonde
Et qu’un Dieu de bonté ne voudra point punir !
Pour bien apprécier sa douceur mensongère,
Il faudrait, quand tout brille au plafond du banquet,
Avoir caché ses yeux dans l’ombre de son verre,
Et pleuré dans cette ombre, — et bu la larme amère
Qui tombait et qui s’y fondait !

Un soir, je la buvais, cette larme, en silence…
Et, replongeant ma lèvre entre tes lèvres d’or,
Je venais de reprendre, ô ma sombre Démence !
L’ironie, et l’ivresse, et du courage encor !