Page:Barbey d’Aurevilly - Rhythmes oubliés, 1897.djvu/49

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qu’on vit aux premiers jours de l’univers quitter le ciel pour les filles des hommes. Oui ! c’était un de ces êtres saintement purs et si élevés qu’ils ne peuvent jamais aimer qu’au-dessous d’eux dans la vie. Eh ! comment l’aurait-elle compris ?… N’avait-il pas en lui tout ce qui ajoute au bandeau de l’Amour et au bandeau de la Fortune ?… Il possédait la puissance du Rêve et il était d’une si noble nature qu’il en paraissait lui-même un. Poète dont la poésie ne tenait pas seulement dans la pensée, il était un de ces Pygmalions qui se tailleraient des Galatées dans la pierre, l’argile et la fange, et feraient passer leur génie dans les plus viles matières, mais n’y peuvent faire passer leur âme. En cela plus malheureux que le sculpteur antique, — car les Galatées qu’ils élèvent sur le piédestal de leur cœur n’en descendent que quand le piédestal est écrasé par la statue !

VIII

Mais elles en tombent alors… Et elle en tomba !… Il vint un moment où ce chef-d’œuvre d’un cœur insensé s’écroula sur le cœur qui avait été son pavois, — son