Page:Barbey d’Aurevilly - Rhythmes oubliés, 1897.djvu/50

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pavois brûlant et son piédestal idolâtre ! Brute et imbécille bloc humain sur lequel l’Amour et la Poésie avaient moulé le masque radieux de Junon l’Olympienne ! elle tomba du cœur qui l’avait portée et qu’elle avait fini par briser sous son poids inerte… Ah ! ce fut un jour de douleur, mais ce fut aussi un jour de délivrance, quand cette beauté sculptée par nous, cette chimère née de nos caresses, ce bas-bleu dont nous avions fait une fière Déesse de marbre turquin, tout un éblouissement d’azur, comme le Ciel, l’Océan, les Espaces, ne fut plus devant nous que ce qu’elle était, — un bas-bleu descendu et mis de plain-pied sur la terre, un être déformé par de trop viriles ambitions, une femme déchue à qui il fallait couper la chevelure comme aux rois qui ne sont plus dignes de régner, mais à qui nous nous contentâmes d’arracher en riant ses bottines bleues !

IX

Et ce jour-là, la Justice reconnaissante baisa au Mépris sa main vengeresse ; car la foudre sous laquelle était tombée cette Titane de nos inventions n’avait été que