Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/129

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Le cœur bondissait à Néel de Néhou de sentir le bras de Calixte sur son bras. Il avait bien deviné ce qui devait suivre. Néel était aimé de ces paysans parmi lesquels il avait vécu dès l’enfance. Quand ils l’aperçurent parler, tête nue, aux Sombreval, l’étonnement, — un étonnement sans bornes, — leur coupa la parole ; ils se turent. Ils ne comprenaient pas que leur monsieur Néel pût frayer avec des Sombreval !!!

Un autre que Néel aurait perdu sa popularité, ce jour-là. Mais il avait les dons irrésistibles qui plaisent à l’imagination des foules. Il avait la jeunesse. Il avait la beauté fière, dégagée, ouverte et souriante. Il marcha, avec l’aisance et l’assurance qui enlèvent tout, sur ces paysans étonnés qui obstruaient la porte du cimetière.

Ils s’étaient tus, ils s’écartèrent, ôtant leurs chapeaux devant Néel et devant cette fille qu’ils venaient d’insulter ; — n’en croyant pas leurs yeux — stupéfaits, confondus !

Néel n’avait pas même eu besoin de leur parler. Sombreval marchait derrière les jeunes gens comme un énorme molosse ; et tous les trois, après avoir franchi la porte de l’enclos sans encombre, ils se perdirent sous les chemins couverts qui conduisaient de ce côté-là au Quesnay.