Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/86

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tous les nobles motifs qui pouvaient alléger la pesanteur de son sacrifice, — et puis, monsieur, après cette joie donnée à votre Calixte, vous avez Dieu, — le Dieu auquel vous revenez, et le sentiment d’un immense devoir accompli !

Mais Sombreval, se tournant à demi vers Néel et le regardant avec des yeux épouvantablement tranquilles dans leur ardeur sombre :

— Je n’ai que Calixte, — fit-il. Oui ! parlez-moi de Calixte ! Il n’y a qu’elle pour moi ! Il n’y a pas de Dieu.

Néel, d’étonnement, avait arrêté son cheval, et comme ils trottaient botte à botte, le cheval de Sombreval s’arrêta comme son compagnon :

— Et vous aussi, Néel, — dit Sombreval, — vous avez cru !… Mais, — fit-il en se reprenant tout à coup, — c’est tout naturel que vous ayez cru à cette comédie ! C’est tout naturel que vous, qui êtes jeune et qui avez les croyances que j’avais à votre âge et même plus que vous ; que l’abbé Méautis, qui est un prêtre ; que Calixte, qui depuis quinze ans prie pour moi, vous croyiez tous au repentir du vieux Sombreval, quand il vous dit qu’il se repent et qu’il s’en va demander à son évêque une soutane dans laquelle il puisse mourir. Il est tout naturel que les gens de Néhou à qui on le dira dimanche le croient aussi.

Est-ce que la grâce n’est pas là pour expli-