Page:Barbey d’Aurevilly - Une histoire sans nom, 1882.djvu/222

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Un petit tremblement prit madame de Ferjol à ces paroles, et le moine lui tendit la bague, qu’elle ne prit pas… Il lui aurait été, à ce moment, impossible de toucher à cette bague profanée et souillée, dix fois profanée et souillée, et prise à la main coupée d’un voleur !

— Le nom… dit-elle, surprise et balbutiante.

— Oui, madame, interrompit le moine, le nom de l’homme qui a fait le malheur de votre vie et que vous avez dû bien des fois maudire, le nom de cet homme qui s’appelait, en religion, le Père Riculf, de l’Ordre des capucins, hébergé chez vous, pendant tout un Carême, il y a, tout à l’heure, vingt-cinq ans.

À ce nom, madame de Ferjol devint pâle comme si elle allait mourir, mais elle ramassa son âme énergique pour faire la question, la terrible question d’où dépendait toute sa vie.

— N’avez-vous que cela à m’apprendre, mon Père ? dit-elle, en le regardant de ses yeux profonds ; de ces yeux sous lesquels Lasthénie, la pauvre Lasthénie, avait toujours baissé les siens !