Page:Barbey d’Aurevilly - Une histoire sans nom, 1882.djvu/223

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— J’ai tout à vous apprendre, madame, car il m’a tout raconté, réconcilié avec Dieu, sur la cendre où meurt notre Ordre et où il est mort, et il a déclaré, il y a à peine quelques jours, sur le crucifix que je lui faisais baiser, à cette heure suprême, qu’il a été le seul coupable et que votre fille était innocente de son crime.

— Alors, oh ! alors, c’est moi… dit madame de Ferjol, qui fut traversée d’un éclair qui lui fit voir, en sa lueur rapide, toute sa vie.

— Ce n’est pas à moi de vous juger, madame, interrompit le Trappiste, avec une incomparable dignité. Je n’ai à vous annoncer que cette bonne nouvelle pour une âme aussi pieuse que la vôtre : c’est que votre fille était innocente ; c’est que l’Ange invisible, que Dieu a mis à nos côtés, l’Ange gardien de sa vie a pu toujours rester aux siens et la regarder de ses yeux purs et immortels.

Il s’arrêta, étonné que la joie de ce moment n’inondât pas l’âme de cette femme pieuse. Il ne pensait pas au remords qui entrait, du même coup, dans cette âme profonde, le re-