Page:Barbier - Iambes et Poèmes, 1841.djvu/162

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Nature dévorante et jamais assouvie,
Enfant toujours repu, mais qui hurle toujours,
Ne peux-tu pas encore attendre quelques jours ?
Si le don d’un cœur noble et d’un visage austère
Te retire du monde et te fait solitaire,
Si tu fuis loin de nous, ô mon bon frère, ô toi !
Prends garde de tomber au vil amour de soi,
Dans le sentier commun où marchent tous les hommes ;
Fuis la perdition de tous tant que nous sommes,
L’écueil le plus fatal sous la voûte des cieux ;
Songe que de là-haut nous regardent les dieux,
Et que s’ils ont doué quelque âme d’énergie,
C’est pour le bien commun, et qu’au bout de la vie
Ils demanderont compte à tous de leurs travaux,
À moi de ma parole, à toi de tes pinceaux.
Faisons chœur, Salvator, et prenons patience ;
La patience rend légère la souffrance :
Toujours une grande âme, en butte aux coups du sort,
Sous ce manteau divin se résigne et s’endort.