Page:Barbier - Iambes et Poèmes, 1841.djvu/212

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Mais une autre femelle au visage éhonté,
Un enfant de l’orgueil, l’ardente vanité,
Ce monstre qui chez nous sous mille formes brille,
Et de Londre au Japon pousse mainte famille
À sans cesse lutter de luxe et de splendeur,
Au prix de la fortune et souvent de l’honneur.
Ah ! Par elle mon père a vu son opulence
Fondre comme l’écume au sein de l’onde immense ;
Et mon cœur, répugnant à prendre un bas état,
À s’user nuit et jour dans un travail ingrat,
De degrés en degrés, faible et pâle victime,
Je suis tombée au fond de l’effrayant abîme.

Gémissez, gémissez, mes sœurs, profondément ;
Mais, si plaintif que soit votre gémissement,
Si poignantes que soient vos douleurs et vos peines,
Elles ne seront pas si vives que les miennes ;
Elles ne coulent pas d’un fond plein de douceur,
Et n’ont pas comme moi l’amour seul pour auteur.
Ah ! Pourquoi de l’amour ai-je senti la flamme ?