Page:Barbier - Iambes et Poèmes, 1841.djvu/96

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Misère ! Après mille ans de bouleversements,
De secousses sans nombre et de vains errements,
De cultes abolis et de trônes superbes
Dans les sables perdus, et couchés dans les herbes,
Le temps, ce vieux coureur, ce vieillard sans pitié,
Qui va par toute terre écrasant sous le pied
Les immenses cités regorgeantes de vices,
Le temps, qui balaya Rome et ses immondices,
Retrouve encore, après deux mille ans de chemin,
Un abîme aussi noir que le cuvier romain.

Toujours même fracas, toujours même délire,
Même foule de mains à partager l’empire,
Toujours même troupeau de pâles sénateurs,
Même flots d’intrigants et de vils corrupteurs,
Même dérision du prêtre et des oracles,
Même appétit des jeux, même soif des spectacles,
Toujours même impudeur, même luxe effronté,
En chair vive et en os même immoralité ;