Page:Barbier - Satires et Chants, 1869.djvu/203

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Et pour bien vivre un jour savoir parfois jeûner. Mais si notre homme, exempt du feu de gourmandise, Sous sa peau sent courir celui de paillardise, Si Vénus chatouillant ses reins luxurieux Vers son astre lui fait encor tourner les yeux ; Alors, ami Bertrand, victoire ! Sans partage, En tes heureuses mains passera l’héritage. Un vieillard libertin, c’est l’ogre sans pitié Qui demande à tout prix d’être rassasié ; Il faut de la chair fraîche à cet affreux vampire. Donc, par un coup de maître assure ton empire ; Avant qu’il ait sondé ton regard complaisant, Amène-lui ta fille et livre-lui ton sang.

Bertrand. Que dis-tu là, Robert ? Quoi ! Tu veux qu’élodie…

Macaire. Sans intrigue il n’est point de bonne comédie, Et je ne sache pas de meilleur dénoûment Que celui qu’une femme amène dextrement. Or, si j’en crois les bruits qui courent sur ta fille, La rose est sur sa joue et son œil noir petille ; Elle est jeune surtout, point capital et bon Pour faire en son honneur chanter un vieux pigeon.

Bertrand. Mais ma fille, Robert, est une fille honnête !

Macaire. Tu feras la leçon à cette jeune tête. D’abord tu lui peindras son avenir en noir, Puis sous couleur d’hymen la chose feras voir, Et, si bête elle n’est, elle comprendra vite Que fille de seize ans qui n’est pas san