Page:Barbusse - L’Enfer.djvu/215

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comme le jour. Elle trembla charnellement dès que la lumière la toucha, et croisa sur sa gorge ses bras éclatants et purs. Puis, les bras en anse, avançant sa figure empourprée, les lèvres attentivement serrées comme si elle n’était appliquée qu’à ce qu’elle faisait, elle dégrafa la ceinture de sa jupe qui coula le long de ses jambes. Elle en sortit avec un bruissement doux, comparable à celui que fait le vent dans tout le jardin profond.

Elle retira le jupon noir qui endeuillait et attiédissait ses formes, le corset, cette force qui appuyait hardiment sur elle, le pantalon qui, avec sa forme et ses replis, mollement, imitait sa nudité.

Elle s’adossa à la cheminée. Elle avait des mouvements larges, majestueux et beaux, mais pourtant jolis et féminins. Elle défit un bas, retira du mince voile ténébreux une jambe polie et ample comme celle d’une statue de Michel-Ange.

À ce moment elle frissonna, immobilisée net, prise d’une répugnance. Elle se remit, et dit, pour expliquer le tressaillement qui l’avait arrêtée :

— J’ai un peu froid…

Puis elle continua, montrant, en la violant, son immense pudeur — et elle porta une main sur le ruban de sa chemise.

L’homme cria, tout bas, pour ne pas lui faire peur avec sa voix :

— Sainte Vierge !…

Et il était là, pelotonné, ratatiné, toute l’existence dans les yeux, brûlant dans l’ombre, avec son amour aussi beau qu’elle.

Il râlait : « Encore… Encore… »