Page:Barbusse - L’Enfer.djvu/232

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lence et sa grossièreté, avait horriblement raison. Mauvais prêtre ? Non, bon prêtre qui n’avait cessé de parler selon sa conscience et sa croyance, et qui cherchait à appliquer simplement sa religion, telle qu’elle est, sans concessions hypocrites. Ignorant, maladroit, fruste — oui, mais honnête et logique même dans son affreux attentat. Pendant une demi-heure que je l’avais entendu, il avait essayé, par tous les moyens qu’emploie et que recommande la religion, de pratiquer son métier de recruteur de fidèles et de donneur d’absolution ; il avait dit tout ce qu’un prêtre ne peut pas ne pas dire. Tout le dogme se montrait, net et explicite, à travers la brutale vulgarité du serviteur, de l’esclave. À un certain moment, désemparé, il avait gémi avec une vraie souffrance : « Qu’est-ce que vous voulez que je fasse ! » Si l’homme avait raison, le prêtre avait raison. C’était le prêtre, la bête de la religion.

… Ah ! cette chose qui ne bougeait pas, droite, près du lit… Cette grande chose haute qui n’y était pas tout à l’heure — interceptant la flamme sautante de la bougie posée près du malade…

Je fis, par mégarde, un peu de bruit en m’appuyant, et très lentement, la chose tourna vers moi une figure, avec une épouvante qui m’épouvanta.

Je connaissais cette tête trouble… N’était-ce point le patron de l’hôtel, un homme aux allures étranges, qu’on voyait peu…

Il avait rôdé dans le couloir, attendant le mo-