Page:Barbusse - L’Enfer.djvu/77

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crois qu’elle est nue ; je ne distingue pas bien les lignes et les formes. Mais sa tête s’est renversée en arrière dans le reflet de la fenêtre, et je vois cette figure de soir où les yeux brillent, où la bouche brille aussi comme les yeux, cette figure étoilée d’amour !

Il la pressa sur lui, homme dénudé dans l’ombre. Même au milieu de leur consentement mutuel, il y eut une sorte de lutte ; une émotion extraordinaire, sainte et sauvage, régna, et bien que je ne le vis pas, je sus le moment où sa chair était entrée dans celle de la femme.

… Mon immobilité prolongée me broyait les muscles des reins et des épaules, mais je m’aplatissais contre le mur, collant mes yeux au trou ; je me crucifiais pour jouir du cruel et solennel spectacle. Je l’embrassais, cette vision, de toute ma figure, je l’étreignais de tout mon corps. Et le mur semblait me rendre les battements de mon cœur.

… Les deux êtres enserrés l’un par l’autre tremblaient comme deux arbres mêlés. La volupté, éperdument, au delà des lois, au delà de tout, même de la sincérité des amants, préparait son chef-d’œuvre de douceur. Et c’était un mouvement si emporté, si furieux et si fatal, que je reconnus que Dieu ne pourrait pas, à moins de tuer les êtres, arrêter ce qui s’accomplit. Rien ne le pourrait, et cela fait douter de la puissance et même de l’existence d’un Dieu.

Au-dessus de l’enchevêtrement de leurs personnes, il levait la tête, la rejetait en arrière, et il restait