Page:Barbusse - L’Enfer.djvu/92

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Quelqu’un… quelqu’un était là… Enfin ! Il ne s’était pas trompé, l’instinct qui m’avait arraché à l’étreinte de mon lit.

Je fis des yeux un effort désespéré ; mais l’obscurité était impénétrable. À peine la fenêtre s’azurait dans la profondeur épaisse, et même j’ignorais si c’était elle, et si je ne la faisais pas.

Le bruit se fit à nouveau entendre, un peu plus prolongé…

Des pas — oui, des pas… Il marchait — un souffle, des dérangements d’objets, des sons furtifs, indéfinissables, coupés de silence, qui me semblaient sans raison.

L’instant d’après, je doutai… Je me demandai si cela n’avait pas été une bourdonnante hallucination, créée par les secousses de mon cœur.

Mais le son d’une voix humaine vint divinement à moi.

Comme elle était basse ; surtout, comme elle était étrangement monotone, cette voix ! Elle semblait réciter une litanie ou un poème. Je retins mon souffle pour ne pas faire évanouir cette approche de vie…

… Elle se dédoubla… C’étaient deux voix qui se répondaient. Elles débordaient d’une tristesse