Page:Barillon-Bauché - Augusta Holmès et la femme compositeur, 1912.pdf/48

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
41
AU SOMMET

fable, affectent de dédaigner ce à quoi il leur est bien interdit de prétendre, car si beaucoup d’instrumentistes jouent sans âme, trop nombreux sont les artistes lyriques qui chantent sans voix. Est-ce chanter ? Devant les approbations enthousiastes dont on encourage ces singuliers représentants de la musique au théâtre, on peut espérer voir bientôt à l’Opéra-Comique ou à l’Opéra notre pathétique Mounet-Sully. Il lui serait facile de discipliner ses syllabes sur certaines notes d’accompagnement, à l’occasion il rugirait plus bruyamment que maints artistes détaillant la partition en mots saccadés puis lançant soudain d’indistinctes et chevrotantes clameurs, et la supériorité en déclamation du célèbre doyen de la Comédie-Française, comme l’harmonie de ses altitudes, ne sauraient être mises en doute ! Pourtant, dût la réprobation de subtils connaisseurs me foudroyer, je m’obstinerai à mieux gouter les œuvres musicales servies avec quelques raffinements de mimique en moins et quelques richesses purement vocales en plus, la musique devant arriver à notre âme en passant par nos oreilles et non par nos yeux.

Au temps où la Montagne Noire vit les feux de la rampe, le prestige des belles voix et de l’art du chant l’emportait, sans exception, sur la pantomime ; l’opéra d’Holmès eut donc l’interprétation qui lui convenait et qu’il pouvait le plus ambitieusement souhaiter.

À l’orchestre, Taffanel conduisait ; la mise en scène et les décors confirmaient la somptuosité habituelle à notre Académie nationale de musique.