Page:Barine - Alfred de Musset, 1893.djvu/148

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d’esprit met en pénitence les blancs-becs qui font profession de ne pas croire à la vertu des femmes, pour donner à comprendre qu’ils ont toujours été irrésistibles. Sans faire de tapage, sans pousser de cris, Barberine donne au jeune Rosemberg une leçon dont il se souviendra, et peut-être sans trop d’amertume. Il est si enfant, qu’il est capable de trouver amusant, au fond, de gagner son souper en filant. « C’est un jeune homme de bonne famille, écrit Barberine à son mari, et point méchant. Il ne lui manquait que de savoir filer, et c’est ce que je lui ai appris. Si vous avez occasion de voir son père à la cour, dites-lui qu’il n’en soit point inquiet. Il est dans la chambre du haut de notre tourelle où il a un bon lit, un bon feu, et un rouet avec une quenouille, et il file. Vous trouverez extraordinaire que j’aie choisi pour lui cette occupation ; mais comme j’ai reconnu qu’avec de bonnes qualités il ne manquait que de réflexion, j’ai pensé que c’était pour le mieux de lui apprendre ce métier, qui lui permet de réfléchir à son aise, en même temps qu’il lui fait gagner sa vie. Vous savez que notre tourelle était, autrefois une prison ; je l’y ai attiré en lui disant de m’y attendre, et puis je l’y ai enfermé. Il y a au mur un guichet fort commode, par lequel on lui passe sa nourriture, et il s’en trouve bien, car il a le meilleur visage du monde, et il engraisse à vue d’œil. » Rosemberg a si peu de rancune qu’il engraisse ! C’est d’un bon petit garçon, qui ne recommencera