Page:Barine - Alfred de Musset, 1893.djvu/164

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le, reprit mon père hors de lui. Il y a des siècles que nous sifflons de père en fils…. Tu n’es pas mon fils ; tu n’es pas un merle. »

L’excellent M. de Musset-Pathay avait pris les choses moins au tragique, mais il croyait tout de bon, après le premier volume de son fils, que ce n’était pas là siffler.

Repoussé par les siens, le merle blanc est méconnu des cénacles emplumés auprès desquels il cherche un asile, parce qu’il ne ressemble à personne. Il prend le parti de chanter à sa mode et devient un poète célèbre. La suite n’est pas moins transparente. Il épouse une merlette blanche qui fait des romans avec la facilité de George Sand : « Il ne lui arrivait jamais de rayer une ligne, ni de faire un plan avant de se mettre à l’œuvre ». Elle avait aussi les idées avancées de l’auteur de Lélia, « ayant toujours soin, en passant, d’attaquer le gouvernement et de prêcher l’émancipation des merlettes ». Le poète emplumé croit posséder l’oiseau de ses rêves, assorti à sa couleur comme à son génie. Hélas ! sa femme l’avait trompé. Ce n’était pas une merlette blanche ; c’était une merlette comme toutes les merlettes ; elle était teinte et elle déteignait !

Les nouvelles sont semées de souvenirs personnels. Quand l’amoureux n’est pas Musset en chair et en os, il est rare qu’il n’ait pas du moins avec lui quelque trait, quelque aventure en commun. Les héroïnes sont presque toutes croquées d’après nature, comme aussi les paysages, les intérieurs, les épisodes.