Page:Barine - Alfred de Musset, 1893.djvu/79

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qui ne savait que nier et blasphémer : s’il fait jamais quelque chose de grand, c’est à elle qu’il le devra.

Il continué à parler de Pagello avec tendresses. Il va jusqu’à dire : « Lorsque j’ai vu ce brave P., j’y ai reconnu la bonne partie de moi-même, mais pure, exempte des souillures irréparables qui l’ont empoisonnée en moi. C’est pourquoi j’ai compris qu’il fallait partir. » On remarque cependant une nuance dans son amitié pour Pagello, aussitôt que Musset est rentré à Paris. Il semble qu’en remettant le pied dans cette ville gouailleuse, il ait eu un vague soupçon que le « lien idéal » dont tous trois étaient si fiers pourrait bien être une erreur, et une erreur ridicule.

A la page suivante, il confesse ses enfantillages. Il a retrouvé un petit peigne cassé qui avait servi à George Sand, et il va partout avec ce débris dans sa poche.

Plus loin : « Je m’en vais faire un roman. J’ai bien envie d’écrire notre histoire. Il me semble que cela me guérirait et m’élèverait le coeur. Je voudrais te bâtir un autel, fût-ce avec mes os[1]. »

Ce projet est devenu la Confession d’un Enfant du siècle. George Sand avait déjà commencé, de son côté, à exploiter la mine des souvenirs. La première des Lettres d’un voyageur était écrite, et annoncée à Musset. Nous aurons maintenant, jusqu’à la fin de la tragédie, comme une légère odeur d’encre

  1. Ces fragments ont été cités par M. Edouard Grenier dans ses charmants Souvenirs littéraires (Revue bleue du 15 octobre 1892).