Page:Barine - Alfred de Musset, 1893.djvu/94

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

A son tour de s’accuser et d’implorer son pardon. Son orgueil est brisé. Elle prend un amer plaisir à se ravaler, à justifier les pires insultes de Musset. Mais est-ce que la leçon n’a pas été assez dure ? n’est-elle pas assez punie ? « Vendredi… : J’appelle en vain la colère à mon secours. J’aime, j’en mourrai, ou Dieu fera un miracle pour moi. Il me donnera l’ambition littéraire ou la dévotion…. Minuit. Je ne peux pas travailler. O l’isolement, l’isolement ! je ne peux ni écrire, ni prier,… je veux me tuer ; qui donc a le droit de m’en empêcher ? O mes pauvres enfants, que votre mère est malheureuse ! —Samedi, minuit… : Insensé, tu me quittes dans le plus beau moment de ma vie, dans le jour le plus vrai, le plus passionné, le plus saignant de mon amour ! N’est-ce rien que d’avoir maté l’orgueil d’une femme et de l’avoir jetée à ses pieds ? N’est-ce rien que de savoir qu’elle en meurt ?… Tourment de ma vie ! Amour funeste ! je donnerais tout ce que j’ai vécu pour un seul jour de ton effusion. Mais jamais, jamais ! C’est trop affreux. Je ne peux pas croire cela. Je vais y aller. J’y vais.—Non.—Crier, hurler, mais il ne faut pas y aller, Sainte-Beuve ne veut pas. »

Son exaltation en arrive au délire. Les fameuses lettres de la Religieuse portugaise sont tièdes et calmes auprès de quelques-unes de ces pages, qui peuvent compter parmi les plus ardentes que l’amour ait jamais arrachées à une femme. Elle se traîne à ses pieds, mendiant des coups faute de mieux : « J’aimerais mieux des coups que rien », et entremêlant