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L’APPEL AU SOLDAT

mon affaire d’attaquer les chefs de la majorité, » finit par se charger d’une démarche près de Renaudin. Huit jours plus tard il revenait. Il se fit jurer qu’en aucun cas Sturel ne le découvrirait, puis il lui dicta une note qu’il garantissait authentique.

« Dans les rapports de la Compagnie de Panama avec le gouvernement, on doit distinguer quatre catégories de distributions :

« Des chèques furent remis par le baron de Reinach. Nul doute qu’il n’en possède les talons et que, par ailleurs, le banquier payeur n’ait gardé pour sa décharge le papier présenté.

« Il y a eu des sommes versées directement par les administrateurs et le plus souvent, semble-t-il, de la main à la main, sans chèques ni reçus.

« Le nommé Arton, délégué par la Compagnie et plus spécialement par le baron de Reinach, se vante d’avoir dispersé un million trois cent quarante mille francs entre cent quatre députés. Il cite les noms et les chiffres, qui variaient suivant la résistance et l’importance du personnage. Il est monté jusqu’à deux cent cinquante mille francs en faveur de M. FIoquet, pour les besoins du Gouvernement ; il descendait parfois à mille francs.

« Enfin la Compagnie consentait à certains journaux dirigés par les parlementaires des prix de publicité en disproportion avec leur tirage. Même elle fournit le Soir à Burdeau et la Vraie République à Bouteiller. C’était subventionner ces deux politiciens. »

Suret-Lefort brûla son brouillon, puis, toujours pressé de rendez-vous, il ajouta, en mettant ses gants :