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JOURNÉE D’AGONIE DE REINACH

tradicteur. Aujourd’hui ses fortes mains étrangleraient volontiers ce mauvais juif de qui vient tout le péril. Mais, quand la tempête secoue la barque, ce n’est pas l’heure que deux matelots satisfassent leur haine : Reinach et Rouvier se distribuent la besogne urgente.

D’abord ils aviseront à l’attitude de Floquet. On dit qu’au début de la séance celui-ci expliquera comment il a reçu de Panama trois cent mille francs. On est perdu si l’on entre dans la voie des aveux. Qu’il se taise. — Ensuite, il faut obtenir de Ricard qu’il ne se prête pas à l’interpellation Delahaye. — Enfin, troisième point : les citations des inculpés n’ayant pas encore été lancées, il faut, par un suprême effort, les faire ajourner, sinon déchirer.

Tout cela, pour gagner un délai, pour trouver le temps de satisfaire les deux cruels étrangleurs, Cornelius, qui veut des millions, et Constans, qui veut la présidence du conseil. Rouvier y va travailler toute la matinée au conseil des ministres ; il donne rendez-vous à Reinach pour deux heures, chez Clemenceau.

Où courut Reinach en quittant Saint-James ?

Vers midi, un commissionnaire sonnait au domicile de Georges Duval, secrétaire de rédaction de la Libre Parole, et le prévenait qu’en bas, sur le trottoir, un monsieur désirait lui parler.