Page:Barrès – Leurs Figures.djvu/200

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
196
LEURS FIGURES

pour le voir de plus près et les « banderilleros » se précipitent pour retirer de son garrot leurs flèches. Les ennemis du Parlement couraient déjà à travers Paris montrer les mots dont ils avaient ensanglanté leurs adversaires. La ville, la France, devenues un immense amphithéâtre, applaudissaient le succès.

Vers minuit, Sturel put rejoindre Déroulède dans un bureau du Palais-Bourbon. Entouré des principaux de sa ligue, le vainqueur corrigeait les épreuves de son discours. La vaste salle, mal éclairée par une seule lampe au milieu du classique tapis vert, était glaciale. On entendait derrière la porte la conversation des huissiers. François Sturel à demi voix proposa le plan même qu’avait caressé Clemenceau.

Il s’agissait de pousser à la dissolution — assurée si toute la droite, les boulangistes et d’honnêtes gens faciles à entraîner démissionnaient — puis d’opposer des candidats sûrs aux chéquards dont la liste serait publiée quinze jours avant le scrutin. On obtiendrait ainsi une majorité pour faire la revision, ou du moins, si le Sénat la poussait, une majorité capable d’organiser la terreur par une commission d’enquête que ne présiderait pas M. Brisson.

… Quand ils sortirent, dans les couloirs sonores, Déroulède et Sturel croisèrent, accompagné de ses amis, M. Clemenceau, qui, pour