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Page:Barrès – Leurs Figures.djvu/226

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LEURS FIGURES

une violence qu’il ne s’expliquait pas à soi-même, heureux de trouver un forcené, il se lança dans la pire diatribe. Il savait bien que les vérités qu’il développait avec tant de plaisir à cet enfant, il ne les aurait pas affirmées devant Rœmerspacher, Suret-Lefort ou Saint-Phlin, parce qu’elles étaient fort simplistes, mais il se délivrait l’âme.

Fanfournot trouvait encore moyen de le dépasser :

— Ils tuent Boulanger, volent les petites gens, vendent par Cornelius et Reinach la France à l’Allemagne, à l’Angleterre, à l’Italie. Comment s’aviseraient-ils d’exécuter les chéquards !

Dans ce jeune anarchiste, quelque chose de pur, d’orgueilleux, de tendu, présentait des affinités avec l’âme de Sturel qui, dans les familiarités et dans l’intrigue du Palais-Bourbon, s’était souvent sentie flétrie. Et puis Sturel, dans une voie où sa nature ne pouvait que s’écorcher et s’irriter, se consolait, comme fit toujours le peuple français, à crier « Trahison ! trahison ! » Ce mot dispense d’un mea culpa.

À écouter l’infatué Fanfournot, il bâtit soudain un roman d’espérances :

— Vous nous trouveriez des gens énergiques ?

— Moi d’abord, répliqua Fanfournot. C’était dit avec un élan qui révélait un corps jeune, mais aussi avec un infect cabotinage. Travers commun à tous les gens de sport.