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UN RAT EMPOISONNÉ

Celui-là, il osa le citer.

Le procureur général trouvait que de telles confidences lui faisaient une situation immorale. Il se retira, plus éclairé qu’il ne souhaitait sur l’incapacité et la fourberie des politiques. Cependant, M. Clément négligeait la commission « urgente » qu’il avait reçue de se transporter au domicile de M. le baron de Reinach. Décidée le 4 novembre par M. Prinet, commandée le 5, cette démarche ne fut exécutée ni le 5, ni le 6, ni le 7.

Les ajournements de la Justice ne justifiaient pas Reinach. Il avait acheté des hommes politiques ; il semblait donc pouvoir compter sur leur appui. Mais il avait livré leurs noms à Cornelius. Dès lors, comment les avertir du péril sans leur révéler sa trahison, et sans grossir de leur haine les haines qui déjà le pressaient ? Il s’enfonçait en tâtonnant, dans un cul-de-sac où de tous côtés des parois infranchissables grandissaient et le resserraient.

Sa vie et ses pensées, dans cette période intéressante de son agonie, ont été obscurcies à dessein par des personnes de sa complicité. Nous avons plusieurs sources d’informations : le récit de Clemenceau, le récit de Rouvier, quelques renseignements officiels, deux ou trois instantanés que prirent des passants. Le tout concorde à nous montrer un être qui se détraquait. Dans cette situation inextricable, l’adjectif qui rend le mieux son