Page:Barrès - La Colline inspirée, 1913.djvu/192

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mais, ô merveille, sœur Léopold-MarieThérèse du Cœur de Jésus se couche tout de son long en travers de la porte et s’écrie :

— Vous me maçonnerez sur le corps, mais je garderai le passage !

Une bataille acharnée s’engagea sur la religieuse étendue. Un conseiller municipal y perdit son sabot, dont les sœurs s’emparèrent comme d’un trophée pour le briser sur la muraille. Tant et si bien que les assaillants se retirèrent en déroute sous la conduite de l’Oblat, abandonnant pierres et mortier.

Sans plus attendre et pour prévenir un retour offensif, les sœurs entassèrent les moellons contre la porte de la sacristie, y ajoutèrent force bûches et fagots, et dressèrent ainsi une vraie barricade.

Héroïsmes superflus ! Six jours plus tard, la préfecture envoya deux gendarmes, à l’abri desquels les maçons accomplirent leur travail.

Tout Saxon était monté là-haut, et les enfants eux-mêmes. Ces scènes frénétiques firent sur eux une si vive impression qu’ils en furent agités dans leur sommeil plus de dix ans après. Ils crurent avoir vu des saintes transformées en sorcières. Thérèse avait perdu sa coiffe de toile ; ses yeux, ses gestes, sa