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Page:Barrès - La Terre et les morts.djvu/21

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direction imposée aux mouvements de l’humanité — serait intéressé à l’amoindrissement de la nation qui a fait les Croisades dans un sentiment d’émancipation et de fraternité, qui a proclamé par la Révolution le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes !

Mais voilà bien la prétention de toute l’Allemagne, du plus mécanique de ses soldats jusqu’au plus réfléchi de ses professeurs ! Ce n’est point au hasard, mais par le développement d’une pensée nationale qu’ils inscrivent Dieu comme leur allié à deux pas de l’ossuaire de nos compatriotes, les mettant, s’ils sont chrétiens, hors du paradis des enfants de Jésus, s’ils sont athées, hors des affirmations de beauté et de bonté entrevues par l’humanité, rejetant nos armées dans je ne sais quel brigandage et proscrivant la pensée française comme nuisible.

Dans cet étroit espace, les corps entassés de Français et d’Allemands ont bien pu faire cette vigoureuse végétation, cette trentaine d’arbres élancés vers les cieux ; l’Allemagne, consciente d’elle-même, ne veut pas que dans le sein de Dieu, « dans le concert de l’Humanité », le génie français et le génie allemand collaborent. Elle nous excommunie, elle prêche l’anéantissement de notre langue, de notre pensée. C’est une guerre sacrée.

Sur le territoire de Metz et de Strasbourg, l’Allemagne, plus cruelle que les peuples orientaux qui coupent les oliviers et comblent les puits, tend à réaliser son rêve de destruction.

Elle supprime la pensée française dans le