Aller au contenu

Page:Barrès - Le culte du moi : un homme libre.djvu/295

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
263
APPENDICE

l’entrevoyez. C’est tout un vertige délicieux où l’individu se défait pour se ressaisir dans la famille, dans la race, dans la nation, dans des milliers d’années que n’annule pas le tombeau.

J’apprécie beaucoup une « lettre ouverte que j’ai découpée dans le Times. À l’occasion d’une élection à la Chambre des communes, un M. Oswald John Simon, israélite et membre d’une association politique de Londres, écrit : « … Je suis tenu de déclarer ce qui suit pour le cas où j’entrerais dans la vie parlementaire Si un conflit venait malheureusement à naître entre les obligations d’un Anglais et celles d’un juif, je suivrais la ligne de conduite qui paraîtrait en pareil cas naturelle à tout autre Anglais, c’est-à-dire que je suis ce que mes ancêtres ont été pendant des milliers d’années, plutôt que quelque chose qu’ils n’ont été que depuis le temps d’Olivier Cromwell. »

La belle lettre ! Que la dernière phrase de ce juif est puissante ! Elle révèle un homme élevé à une magnifique conscience de son énergie, des secrets de sa vie. Mais quand même cet Oswald John Simon n’aurait pas saisi et formulé la loi de sa destinée, cependant il obéirait à cette loi. Et nous tous, les plus réfléchis comme tes plus instinctifs, nous sommes « ce que nos ancêtres ont été pendant des milliers d’années, plutôt que quelque chose qu’ils n’ont été que depuis le temps d’Olivier Cromwell ». « Je dis au sépulcre : Vous serez mon père ».