de questions précises et multipliées sur l’état de la Vraie République. Bien que le malin paysan fût parvenu à voiler le pire, Bouteiller ne considéra pas qu’il pût s’engager de sa personne en cette galère, mais il souhaita qu’elle se maintînt à flot.
Il laissa entrevoir qu’avant peu certaines circonstances pourraient se produire où, cédant à de nombreuses sollicitations, il prendrait une part active à la politique. À ce moment il reparlerait avec Racadot de ses intentions. Immédiatement, il promettait de s’employer à lui obtenir une mensualité régulière au ministère de l’Intérieur. L’autre remercia chaleureusement, multiplia des protestations qui étaient sincères, mais se désola, disant :
— Une mensualité, c’est parfait, mon cher maître, mais je me suis lié pour cette histoire de diplomate ; c’est une somme à rembourser : si je pouvais toucher tout de suite quelques billets de 1,000 francs ?…
— Eh bien ! dit Bouteiller, je passerai aussi quai d’Orsay.
La répartition des fonds secrets se fait sans méthode sérieuse, par à peu près, les ministres étant éphémères et mal servis.
Le principe est que chaque parti qui passe au gouvernement subventionne les journaux de sa nuance. Mais la préoccupation qui prime tout pour le ministre, c’est d’associer le plus de journaux à ses intérêts, de façon qu’ils retardent sa chute, et, quand elle est venue, qu’ils s’emploient à le rappeler au pouvoir.
En fait, voici comment on procède. Tous les journalistes fonds secrétiers se connaissent, forment une association de frères. Quand un ministre nouveau apparaît, ils se concertent, s’en viennent l’assiéger.