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LES DÉRACINÉS

elle est bornée. Je lui demande du crédit, parce que sur les 40,000 francs, je lui en ai donné 30,000 et j’ai gardé 10,000 pour le roulement. Notre acte porte 10,000 payables le 20 courant. Les affaires sont très délicates avec les femmes, à cause de leurs nerfs. J’invite celle-ci à patienter, en lui disant que tu vas envoyer de l’argent. Mon cher père, fais donc pour moi tout le nécessaire. Ne te donne pas du chagrin ; je ne suis pas si dénaturé que tu le penses. Ton fils gagnant de l’argent te rendra la vie plus douce. Cherche donc, mon cher père, et tu trouveras. Si le banquier de Pont-à-Mousson voulait accepter des traites que tu tirerais sur plusieurs de tes clients pour 5,000 francs, je les remettrais à ma vendeuse : elle attendrait jusqu’à la fin du mois les 5,000 autres francs. Tu auras le temps de te retourner. Déploie toute l’activité possible et réponds en m’expédiant au moins 1,000 francs pour mercredi ou pour jeudi matin. »

Il s’interrompit et, pendant un quart d’heure, demeura appuyé la face contre les vitres, d’où il ne pouvait rien voir qu’une triste cour intérieure. Un délicat l’eût trouvé horrible, car il rongeait les ongles de sa main droite, et grattait son crâne de la main gauche ; mais qu’il était expressif, tandis qu’il cherchait par un dernier trait à émouvoir, à convaincre son père ! Il se remit à sa table, et ce fut tout d’abord du verbiage ; mais bientôt il s’élevait :

« Ne serais-tu pas mieux à Paris que seul à Custines ? Tu ferais rentrer tes fonds, tu vendrais ton matériel et tu viendrais te reposer un peu, car il y a