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LE SYMBOLISME

définitive ; Gustave Kahn resta le seul maître de la Vogue. Deux semaines après, il réussissait à faire reparaître la revue dans une note plus conforme à l’idéal qu’il poursuivait. Le public ne faisait toujours pas grand accueil à la Vogue. La revue menaçait de devenir intermittente. Le numéro 5 avait paru le 13 mai 1886 ; le numéro 6 attendit le 29 mai. Pour un hebdomaire, c’était un loisir d’assez triste augure. Gustave Kahn ne pouvait d ailleurs suffire à tout. Il eut la bonne fortune d’enrôler parmi ses collaborateurs Félix Fenéon, actif et enthousiaste, qui assuma la responsabilité du travail matériel, composition, correction d’épreuves, tirage et mise en vente. Il accepta en outre la rubrique critique d’art et y débuta dans le numéro 8 du 13 au 20 juin 1885 avec un article sur les impressionistes. Dès lois, la Vogue prit un caractère moins bohème, elle parut régulièrement le dimanche et si son tirage n’était pas important, elle donnait l’illusion d’une certaine puissance. Ses rédacteurs étaient alors Mallarmé, Verlaine, Laforgue, Charles Henry, Paul Adam, Jean Moréas, Jean Ajalbert, Mathias Morhardt, Charles Vignier, Charles Morice, Camille de Sainte-Croix, Francis Poictevin, Édouard Dubus, Laurent Tailhade, Albert Mockel et Émile Verhaeren. C’est elle qui publia pour la première fois les plus curieux morceaux de Rimbaud : les Illuminations et Une Saison en Enfer. Par malheur, le public ne mordait pas du tout à cette littérature. Les charges devinrent si lourdes à supporter qu’on décida de suspendre la revue. La Vogue fut donc provisoirement mise en sommeil.

Elle fut reveillée en 1889 par les soins d’Adolphe Retté. Ce poète avait pour ami un commis-rédacteur au sous-secrétariat des Postes et Télégraphes, Michelis di Rienzi, qui s’occupait d’occultisme. Ce jeune fonctionnaire avait fait la connaissance d’un imprimeur également féru de magie qu’il appelait en style d’initié Arcturus. Il s’était laissé dire que cet imprimeur sacrifierait volontiers quelque argent pour éditer une publication de genre ésotérique. M. di Rienzi