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VERLAINE



Et douce à l’infini de l’airain commémoratoire,
Qui va bercer le sommeil un peu triste des vivants
Du souvenir des décédés de toutes les paroisses[1].


Malheureusement, chez Verlaine l’enthousiasme mystique ne dure pas. C’est un accident consécutif à de trop rudes leçons du sort. Ses résolutions de fidèle repentant ne résistent guère à l’ivresse pernicieuse de ses sens. Il a peur des velléités anciennes qu’il entend se réveiller en lui :

Si ces hiers allaient manger vos beaux demains ?
Si la vieille folie était encore en route ?[2]


Or la vieille folie a plus d’un retour offensif. Verlaine, malgré la sincérité de ses mea cnlpa, n’a dit qu’un adieu léger à tout ce qui peut changer [3]. La religion lui apparaît alors moins parfaite. Il lui semble qu’il est avec le ciel des accommodements. Sans doute, il conclut bien haut :

Puisse un prêtre être là, Jésus, quand je mourrai[4],


mais il constate que les ecclésiastiques ne sont pas toujours aussi vertueux qu’ils devraient l’être. Il s’écrie :

O mon cœur, que tu ne vives
Qu’aux fins d’une bonne mort[5],


mais il s’oublie à certaines naïvetés pratiques, à l’exemple de ces dévots italiens qui ne craignent pas de marchander les faveurs de la divinité ;

Et puisque je pardonne,
Mon Dieu, pardonnez-moi[6].


Verlaine n’est donc pas tout à fait le catholique à l’âme simple qu’il prétend être. La religion lui permet de réaliser

  1. Bonheur, XXXI.
  2. Sagesse, I, 7.
  3. Sagesse, I, 23.
  4. Bonheur, XI.
  5. Sagesse, I, 23.
  6. Bonheur, II.