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Page:Barrière-Flavy - Etude sur les sépultures barbares du Midi et de l'Ouest de la France, Privat, 1893.pdf/49

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du midi et de l’ouest de la france

lapidaires… Le berceau où a surgi cet art des Barbares d’Europe a donc été la Scythie, — conclue-t-il, — pays où les éléments artistiques locaux rencontraient et s’associaient des données venues, les unes de l’Orient par les Perses, les autres du couchant par les Grecs. Il est donc oiseux, à notre avis, de chercher à déplacer le berceau de cette intéressante industrie en le transportant tantôt sur les bords du Nil, tantôt à Babylone et à Persépolis, tantôt à Byzance et même à Rome. »

Ces Barbares, partis de régions qui sont maintenant connues, prirent les uns par le nord, les autres par le midi de l’Europe[1]. On ne doit pas, en conséquence, s’étonner de rencontrer chez nous des objets présentant une certaine similitude de forme avec quelques-uns de ceux qui ont été trouvés dans diverses contrées de l’Europe et même dans les provinces scandinaves. Les Goths occupèrent en effet, à une époque qui n’est pas absolument déterminée, les bords de la Baltique, probablement avant de se fixer non loin de l’embouchure du Danube, dans des contrées bien autrement fertiles et sous un climat plus doux[2]. Plusieurs siècles après, ces mêmes Barbares refoulés par les Huns reparurent dans ces pays septentrionaux, et c’est de cette époque que date l’existence des objets en question sur le sol de la Scandinavie[3]. Le savant suédois M. O. Montélius a parfaitement établi que les bijoux trouvés dans cette région de l’Europe ne sont pas des produits indigènes, mais doivent être attribués à l’importation[4]. Ses recherches tendent à montrer qu’une influence orientale incontestable se manifeste sur ces objets de bronze, et à faire considérer le peuple goth comme détenteur de ces bijoux de fer et de bronze répandus dans toutes les contrées soit septentrionales soit méridionales, où les hasards des émigrations l’avaient conduit.

Les antiquités du Caucase qui nous ont été d’abord révélées par M. Chantre sont à coup sûr d’un haut intérêt[5], et M. G. Bapst, qu’une mission scientifique a amené dans ces provinces méridionales de la Russie, a pu constater l’analogie frappante des objets provenant de notre pays et de cette région. Sa conviction est que l’origine orientale des bijoux barbares n’est pas douteuse. Mais les dernières recherches et les récents travaux de plusieurs savants archéologues russes sont de nature à fournir une nouvelle preuve concluante au système présenté et soutenu

  1. J. de Baye, Industrie longobarde, p. 128. — Germain Bapst, l’Étain. — Ch. de Linas, L’orfèvrerie mérovingienne, p.90.
  2. Jornandès, De origine actuque Getarum, lib. II. « … Ex hac igitur Scanzia insula quasi officina gentium, aut certe velut vagina nationum, cum rege suo nomine Berig, Gothi quondam memorantur egressi… qui aptissimas sedes, locaque dum quæreret congrua, pervenit ad Scythiæ terras, quæ lingua eorum Ovim vocabantur… » — M. Hildebrand, Das heidnische Zeitalter in Schweden, et Congrès international de Budapest, 1876, p.522.
  3. Dr Rigollot, loc. cit.
  4. O. Montélius, La Suède préhistorique, passim.
  5. Chantre, Recherches anthropologiques dans le Caucase, t. III, 1885-1887.