Page:Barrot - Mémoires posthumes, tome 1.djvu/20

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tence de l’Assemblée, tandis que la droite et le président de la République demandaient que le pays fût consulté de nouveau. Après une lutte acharnée, la majorité avait donné raison à la droite et au président, mais la gauche espérait encore que cette résolution pourrait être rapportée. Les quinze dernières séances furent donc pleines d’agitations et de combats violents où M. Barrot, à son grand honneur, continua son rôle de conciliateur. Mais, pendant quelques jours, on put croire que la guerre civile allait éclater dans Paris, et pour l’éviter il fallut l’admirable mélange de passion et de sang-froid, d’habileté et de patience que déploya M. Barrot. C’était un beau et triste spectacle que celui de cet orateur, naguère si populaire, forcé, tout en défendant la cause de l’ordre, de se défendre lui-même contre des accusations aussi injustes qu’outrageantes, et réduisant ses adversaires au silence par la netteté de ses explications. Certes, dans le cours de sa vie, M. Barrot a eu des triomphes plus éclatants, il n’en a pas eu qui méritât davantage la reconnaissance des honnêtes gens de tous les partis. À cette époque, personne ne la lui refusait, et chacun reconnaissait qu’à lui surtout la France devait d’avoir pu passer d’une assemblée à l’autre, sans d’horribles convulsions. Malheureusement le souvenir des services rendus s’efface vite, et il ne devait pas tarder à s’en apercevoir.

Malgré ces désordres passagers, aucune assemblée plus que l’assemblée de 1848 n’a droit à l’estime nationale. Composée en grande majorité, au moment de