Page:Barrot - Mémoires posthumes, tome 2.djvu/8

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sonnelles et très-secondaires du mal ; nous n’avons pu en signaler les causes premières et radicales ; assez accusateur pour irriter, notre rapport n’a pas été assez au fond des choses pour dégager toute la vérité. C’est cette même enquête que je refais aujourd’hui, seul, dans le calme du cabinet, déjà bien loin des passions qui nous agitaient alors et surtout débarrassé des entraves, des ménagements forcés que m’imposait une situation officielle ; je la refais avec une pleine liberté d’appréciation : quoiqu’ayant été acteur dans ces événements, je crois pouvoir en parler avec l’impartialité que j’apporterais dans la discussion d’un point de philosophie ou d’histoire.

Cette étude se divisera en quatre chapitres. Dans le premier, je jetterai un coup d’œil sur l’état de la société française au moment où la révolution du 24 février est venue nous surprendre ; le deuxième renfermera l’histoire de la dictature improvisée, le 24 février, sous le nom de Gouvernement provisoire ; le troisième comprendra la période qui s’est écoulée entre la réunion de l’Assemblée Constituante et sa dissolution ; le quatrième retracera les péripéties de l’Assemblée législative et nous conduira jusqu’au coup d’État du 2 décembre. Je m’attacherai bien plus à rechercher les idées et les sentiments qui ont agité et égaré mon pays, dans cette grande épreuve, qu’à retracer des faits récents et trop connus. Nous ne pouvons rien sur les fautes passées ; mais pour prévenir les fautes à venir, c’est sur les sentiments et les idées qu’il faut agir, et c’est la surtout ce que j’essayerai de faire.