Page:Barrucand - Avec le Feu, 1900.djvu/110

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Ces matins-là il spéculait hardiment, rêvait des sacrifices, des révoltes et des fiertés, des protestations féroces contre la philanthropie et l’honnêteté ; le goût de la mort se mariait à sa charité et parfumait son sommeil héroïque.


Les anarchistes l’avaient intéressé. Cependant il avait discerné dans leur doctrine un germe de faiblesse, un principe caduc : cet optimisme invétéré qui les portait à penser qu’un jour le bonheur universel régnerait. Des orateurs verbeux, sentimentaux, allaient prêchant cela, faisant miroiter le prisme des satisfactions matérielles et de la libre jouissance devant les yeux de la foule qui retrouvait dans ces mirages un reflet de ses paradis traditionnels. Robert pensait, lui, que la définitive formule sociale ne sera jamais écrite et que le seul moyen d’élever le peuple au-dessus de sa condition misérable, c’est de l’entraîner vers le danger et de l’arracher à la résignation qui l’engourdit depuis des temps, en substituant à sa morale d’esclave la morale des conquérants. Un but d’éducation et d’entraînement, en somme.

Mais le courage ne s’enseigne pas, il se