Page:Barrucand - Avec le Feu, 1900.djvu/192

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l’air humain, se faisait rare. Et il eut peur, peur de monter aspiré jusqu’au néant, peur de tomber brusquement, platement, écrasé, dans le vertige et la pitié de soi-même. Soudainement la vie s’était abaissée, effacée, perdue dans un recul comme une terre quittée ; et sur lui, en lui, planaient de grandes ailes glacées. Il avait cru être libre : une idée palpitante le tenait, serrait son cœur et fouillait sa cervelle ; il ne pouvait s’y soustraire et chasser le vautour ; il ne pouvait se dédire, puisqu’il était un petit homme courageux et sincère, volontairement égaré, rapportant tout à soi ou à l’humanité, et qui s’entêtait à considérer les choses sous le jour faux de l’absolu.

Des philosophes plus mûrs auraient pu combattre son erreur, lui apprendre les résignations, les temporisations, les faillites, l’humilité nécessaire ; ou mieux encore redresser, éduquer son sens de l’action, le guérir de l’héroïsme, comme d’une déviation anormale, par un traitement bien entendu. Mais il n’exposait pas sa force de volonté à la dispute.

En fait, son angoisse s’était traduite par un accès de misanthropie. Il avait éloigné ses amis