Page:Barrucand - Avec le Feu, 1900.djvu/224

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Il le prit, le retourna, le palpa curieusement sans se décider tout d’abord à déchirer l’enveloppe de fort vélin tramé. Il pensait à autre chose.

La suscription tracée d’une encre batailleuse fixa son attention. Il crut y reconnaître l’écriture du baron d’Héréville.

— Que me veut-il ? Encore la Société des amateurs ! Marche-t-elle enfin leur société ?

Cette société, il en avait lancé l’idée, l’hiver précédent, chez la vicomtesse de Trédern dont le salon de musique comptait parmi les mieux cotés ; c’était une combinaison basée sur la fatuité et le snobisme, qui devait réussir ; le petit d’Héréville, remuant et phrasier, piquante moustache de laiton, s’en était emparée : il s’agissait de grouper des gens du monde, flûtistes comme Frédéric II, violonistes comme Ingres ou Gouvion de Saint-Cyr, et de les encadrer dans un orchestre solide, pour leur donner l’illusion d’un labeur d’art, ou le simple plaisir de faire leur partie dans des œuvres classiques. C’était encore une petite protestation des salons de haute musique contre le trop vulgaire piano, et en même temps une réponse à la Société des