Page:Barrucand - Avec le Feu, 1900.djvu/296

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perd sa forme native et cesse d’être sa propre méditation ; instinctivement elle se révoltait contre la destinée utilitaire de son sexe ; spirituelle et jolie sous ses cheveux serrés aux tempes comme deux plaques d’or, elle ambitionnait encore d’échapper aux fatalités de la chair ; après tant de siècles d’esclavage traditionnel et d’adoration fausse, l’amour ne flattait pas son amour-propre. Elle se sentait en possession de soi et se complaisait à cet orgueil d’être.

Des impressions vécues et des livres elle n’avait gardé qu’un affolement sans infirmité religieuse ; des crises de sa nature nerveuse et des écarts de son imagination, elle n’avait retenu que ce qui exalte, ce qui renforce la personnalité et l’élève à la conscience morale par seul souci de noblesse et de beauté. Elle ne connaissait pas les petites terreurs, les faibles prières, la peur du péché, la lèpre des bigoteries ; elle ignorait l’hypnose des plaies et du cœur sanglant ; cependant elle aimait le chant des églises, leur luxe de pierre et jusqu’à la hauteur de leurs flèches ; un prélude de Bach lui semblait contenir plus de foi et de