Page:Barrucand - Avec le Feu, 1900.djvu/298

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taillés de celui qui ne ressemblait pas aux autres et qui l’avait séduite par son air d’aventure.

Elle l’avait connu d’intentions hautes, rebuté par quelques heurts, cachant ses émotions et jouant au terrible, le cœur déjà crispé d’un noir lierre ; elle aurait pu le fixer à son foyer, triompher de lui, l’épanouir : elle ne l’avait pas voulu et restait, lui semblait-il, responsable de son destin. Maintenant elle le sentait parti, sans retour possible, éloigné à cause d’elle et par elle, en grande peine à cause de tout, libre, lui — vraiment trop libre —, sans attaches, à la dérive après la chute de toutes les étoiles, incapable de trouver sa voie. Elle le voyait flottant, quelque temps amusé aux aspects des rives, attardé aux méandres, mais déjà pénétré, lourd comme une éponge, imbibé de la douleur du monde.

Elle illustrait sa compassion de métaphores tragiques. Des vers de Rimbaud chantaient à son oreille.

Elle évoqua encore avec orgueil, et non sans un plaisir cruel, le dédaigneux qui l’avait implorée, se pénétra de l’amertume de sa