Page:Barrucand - Avec le Feu, 1900.djvu/304

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passaient de grands mulets aux colliers cornus, ces colliers héraldiques que vous connaissez ; des oliviers noueux au feuillage cendré mouvementaient la plaine ; j’aimais aussi la flamme sombre des cyprès qui bordaient les champs, les collines pierreuses couvertes d’une végétation rabougrie aux tons de lichens d’un vert usé, les bicoques sèches aux toits plats et les enclos des fermes, les vergers où de capricieux amandiers secouaient déjà leurs fleurs de papier. Je sentais confusément que là commençait une autre terre.

« Avant d’arriver à Marseille, parmi des éboulements de roches blanches, je vis briller au loin la Méditerranée et j’en reçus dans les yeux la flamme d’un miroir doublant le ciel.

« Je me sentais léger d’effleurer ces aspects dans la course du train, j’avais en moi le sentiment de l’espace : je vous devais ce bonheur.

« À Marseille, je marchai longtemps par les rues populeuses et chantantes sous les platanes, je me plongeai dans le bruit et dans la foule, je respirai la ville inconnue. Il me semble que je pourrais vous parler longtemps de ces quais où toutes les races semblent avoir pris rendez-