Page:Barrucand - Avec le Feu, 1900.djvu/48

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Oh ! doute !

Ce n’était pas assez que son inspiration fût saluée des initiés ; il rêvait, lui aussi, d’un art magique et total, d’une langue universelle exprimant l’éternité du sentiment et son mystère. Il avait peur de la foule, mais ce n’était qu’une pudeur ; il redoutait surtout l’épreuve, le contact brutal, craignait un échec qui lui aurait enlevé la foi en soi-même ; et c’était une appréhension touchante et religieuse, une pureté un peu ridicule. À soixante ans, il expérimentait encore le pouvoir émotionnant de sa pensée ; il raccrochait des auditeurs de hasard avec une volupté inquiète.

Cependant il cherchait à se persuader que cette fois la provocation n’était pas venue de lui.

Après une station chez le rôtisseur, ils traversèrent le boulevard Rochechouart et s’arrêtèrent devant une maison haute et sombre. La porte étroite ouvrait sur un corridor qui sentait le plomb ; un salpêtre d’écurie fleurissait aux murs. En montant les premières marches de l’escalier tournant, ils dérangèrent deux