Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/172

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

On t’en apprendra sur son compte de toute façon.

Les étourdies et les sottes te le peindront comme ravissant, séduisant ; les maniaques, les désespérées en diront le plus de mal possible.

Il ne faut croire, ni ces optimistes à l’excès, ni ces pessimistes de mauvais augure.

Tu rencontreras, sans doute, dans ce monde dont on parle tant, bien des ennuis et bien des contrariétés.

Des bruits de scandales, de trahisons, d’infidélités, viendront quelque jour frapper tes oreilles ; tu verras autour de toi des misères, des défaillances ; que cela ne t’effraie pas.

Quelque fois aussi, et cela fait plus de mal encore, une main qui t’était chère te blessera dans l’ombre, ta confiance dans la bonne foi de tes semblables sera déçue… mais il y aura toujours, crois-moi, bonnes âmes prêtes à sympathiser avec la tienne.

À côté de la faiblesse, tu verras la force ; près du vice, la vertu ; près de la lâcheté, l’héroïsme.

Dans ce monde, le dévouement absolu souvent coudoie l’affreux égoïsme, et la reconnaissance vient consoler de la noire ingratitude…

Tu verras tout cela : les larmes, les sourires, le bonheur, le malheur, et, si ton petit cœur est tendre, compatissant, il en sera ému et plein de pitié.

Mignonne, tu ne comprends pas maintenant ces choses. Plus tard, quelques-unes s’imposeront à toi ; d’autres se poseront en énigmes toute ta vie.

Tu ne devineras peut-être jamais pourquoi la femme, cet être si délicat, « personnification de la faiblesse et de la dépendance, » si l’on en croit le langage de nos maîtres, doit combattre ici-bas les combats du plus fort ?

Le devoir et l’honneur lui ont tracé une route, de laquelle, ma chérie, elle ne peut jamais s’éloigner, et, tandis qu’on accorde au sexe fort le droit de forfaire à ses obligations les plus sacrées, on flétrit impitoyablement la