Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/239

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Une avenue superbe monte jusqu’à l’habitation. Ah ! cette avenue, comme je l’aimais, avec son demi-jour, mystérieux, ses petits bancs sous les arbres, témoins discrets de mainte confidence.

L’épaisse ramure, se rejoignant à la cime, forme comme un dôme vert et la brise, en se jouant dans la branchure des arbres, trouble à peine la « belle esthétique de leurs enlacements. »

Le hamac, suspendu aux saules, a bien souvent favorisé nos douces rêveries. Le feuillage frémissant modulait une plaintive berceuse, qui charmait étrangement durant ces heures de repos.

On se sentait si bien, si paisiblement heureux qu’il semblait que l’ambition la plus effrénée n’eût jamais rien désiré au monde que ce moment de félicité, loin des foules et des grandeurs de la terre.

Comme on se sent meilleur au contact de la grande nature ! Comme on se sent redevenir plus simple et surtout plus croyant ! Toute chose porte le cachet non altéré de son puissant Créateur, et la magnificence de son œuvre éclate à chaque instant. Son immensité nous pénètre, et sa présence, que l’on respire jusque dans l’air qui nous entoure, excite en nos cœurs une reconnaissance plus vive pour ces beautés incomparables qu’il a créées pour nous.

Quand se faisait sentir une brise trop froide, ou que la pluie, venant fouetter les vitres, ne nous permettait plus de rester au dehors, avec quelle jouissance nous nous rassemblions dans le salon de verdure, où le lierre s’accrochait partout : aux dentelles des rideaux, autour des tableaux, le long des murs et jusqu’au plafond. Les jardinières, remplies de fleurs et surtout de roses, nous grisaient de leurs subtils arômes.

Là, nous discourions gaiement, avec ce sentiment de bien-être, que l’on éprouve à se sentir chaudement à