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— Personne ; quelque chose me le dit, et cela ne me trompe jamais.

Racontez-moi, ajouta-t-elle d’un ton câlin, ce qui vous a rendu si triste tout à l’heure, j’essaierai de vous consoler.

— J’ai entrevu le ciel qui s’ouvrait tout grand devant moi, répondit-il gravement, et je n’y puis entrer…


Lundi, 4 février.

Je me défie toujours d’une personne qui dit à tout propos : « Moi, vous savez, je suis franche, » c’est un avant-coureur des plus méchantes observations à l’encontre des auditeurs.

Comme si, pour être franc, il fallait nécessairement être impoli. Et pour soutenir cette réputation de franchise, qu’elles crient sur tous les toits, certaines femmes ne manquent jamais l’occasion de vous apostropher directement, et surtout quand il y a beaucoup de monde pour les entendre, en faisant des remarques sur votre personne, vos manières ou votre toilette.

— Ce genre de coiffure ne vous va pas du tout, ma chère, disait en plein salon une de ces belles natures à une dame, qui essayait pour la première fois une mode nouvelle. Vous savez, je suis franche, moi, je dis comme je pense…

Naturellement, tous les yeux se portèrent sur la coiffure de la dame ainsi interpellée, qui rougit jusqu’aux oreilles. Elle essaya de faire bonne contenance, mais tout son plaisir fut gâté pour le reste de la soirée, et il lui tardait de se retrouver dans sa chambre pour se débarrasser de cette coiffure de malheur.

Et tout cela, pour une remarque que l’on n’a nullement sollicitée et qui, le plus souvent, est loin d’exprimer l’opinion générale.

Même lorsque notre avis est demandé, il faut y mettre de la circonspection avant de le donner.