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plus que des rameaux enguirlandés, souples, flexibles comme des baguettes de fées.

Oh ! les fleurettes, les gentilles fleurettes, cachées dans la mousse, chastes floraisons qu’on dirait écloses sous des baisers de vierge, si frôles, si délicates, qu’on craint les voir s’envoler dans les airs sous l’haleine des vents.

Elles sont là, toutes tremblantes sur leurs tiges, livrant aux espaces les parfums de leur âme, embaumant la solitude des bois, et ne demandant qu’à vivre et mourir aux pieds des grands arbres qui les ont vues naître.

Déjà la douce hépatique, notre anémone printanière, a réjoui nos yeux, et la linnée boréale, aux clochettes roses, ouvre timidement son calice aux premiers rayons du soleil de juin.

Le trillium, qui rappelle par sa forme et sa blancheur immaculée le lys royal, émaille à profusion le gazon de la montagne, et la petite violette et la clématite pourpre croissent avec lui dans toute leur sauvage beauté.

Tout est fête sous la feuillée. C’est la note gaie qui domine dans l’air. Elle se joint aux concerts mélodieux des chantres ailés, de la brise murmurante, du doux frisselis des feuilles, des discrets bruissements de l’insecte butinant.

Les oiseaux nous sont revenus. D’abord l’hirondelle au plumage cendré, accrochant sa demeure à nos toits, aux recoins des corniches et jusque sous les arceaux de Notre-Dame.

Voyez les industrieuses ouvrières raser dans leur vol rapide, les prés, les routes, becqueter la graine tombée, saisir le brin de paille échappé à la saison dernière à la gerbe du moissonneur, et s’envoler à tire d’aile, chargées de leur précieux fardeau, tisser le nid qui doit abriter leurs amours.

Le rossignol a quitté sans regret les orangers en fleurs, les plaines parfumées de la Syrie et vient gazouiller ses suaves romances sous notre beau soleil.